J’ai dit que tout est blanc, mais c’est un peu exagéré. Le ciel est blanc/gris, et il y a quelques bosquets verts, et des forêts de sapins, toutes vertes aussi. Ça réchauffe un peu le tableau, parce que pour le moment, il faut quand même très froid. À l’abri du vent, ça va, mais dans la plaine, les rafales sont glacées. Je sens que le bout de mon nez est en train de rougir.
Je suis maintenant un sentier, dans la forêt, heureux de marcher dans cette nature. Qui ne le serait pas ! Quand tout à coup, j’entends des piétinements. Je ne peux pas les manquer, jusque-là c’était le silence absolu. Ça accélère, ça hésite, ça panique, c’est sûr, je ne suis plus seul. Du coup, je suis en alerte. Super tendu.
Au bout d’un moment – ça me semble une éternité – je vois quelque chose qui bouge derrière des arbres. J’hésite à faire la course de ma vie, mais finalement c’est la curiosité qui gagne. Tout doucement, je me déplace, pour essayer de comprendre ce qu’il se passe.
Planqué derrière une branche, je vois enfin à qui j’ai affaire : des cerfs, ce sont des cerfs ! Dans les Highlands, on peut en croiser assez souvent. J’en ai déjà vu, mais d’habitude, ils restent plutôt loin. J’avais essayé d’en approcher, mais à chaque fois ils avaient déguerpi aussi sec.
Mais aujourd’hui, je suis quasiment nez à nez avec des cerfs. Je suis tellement proche, que je peux entendre leur respiration. Il y a … allez … une quinzaine de mètres entre eux et moi, à tout casser. C’est un étrange face à face, je suis seul et ils sont trois. C’est très émouvant en fait.
Bon, pas trop pour l’un des cerfs, qui décide de partir. Le deuxième cerf n’est pas tellement plus intéressé, parce qu’il part aussi. Il reste le troisième, qui me regarde droit dans les yeux. J’essaie de comprendre ce qu’il a en tête.
Est-ce qu’il est chargé de protéger le reste du groupe, et c’est pour ça qu’il reste en arrière ? Est-ce qu’il a peur ? Il n’a pas l’air. Est-ce qu’il est plus curieux que les autres ? Je ne sais pas, mais il a l’air très calme.
Alors, moi aussi, ça me calme. Je vois ses narines bouger, et moi, mes sens sont décuplés. L’odeur du sous-bois, le craquement de la neige, le regard du cerf, le goût du suspense. J’ai l’impression de faire un avec la nature écossaise. Je suis charmé !
Au bout de quelques minutes, le cerf se décide à partir. Il me regarde une dernière fois, avant de disparaître derrière les bosquets. Le cerf n’est plus là, mais son souvenir n’est pas près de s’effacer. Dans ma mémoire, il est profondément gravé.